Témoignage d’une ex militante…

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Est-ce que je regrette d’avoir quitté le véganisme après trois ans ?

— Comment j’en suis arrivée là —

Trois ans de militantisme pur, où mon dévouement et mes convictions envers la cause animale étaient tellement puissants que rien ni personne ne pouvait me faire changer d’avis, où les mots antispéciste, libération animale et véganisme animaient mon quotidien et étaient devenus ma raison de vivre.

Environ âgée de la trentaine, c’est après avoir visionné quelques vidéos très connues de la véganosphère que j’ai pris la décision de me passer de tout produit issu de l’exploitation animale. A ce moment-là, je pensais : Qui suis-je pour me permettre de cautionner l’horreur que subissent les animaux ? Dans ces vidéos, on démontre que la science le dit, l’écologie le dit, l’éthique aussi. L’argumentation semble imparable.

Et moi, je ne pense pas à vérifier les différentes affirmations… je fais confiance, pleine de bonne volonté. Objectivement, à ce moment-là, je ne vois aucune raison de ne pas me lancer ! Après tout, je ne suis pas une personne égoïste et dénuée de sensibilité, et ce mouvement a l’air porteur de superbes valeurs.

N’ayant aucune notion de nutrition à l’époque – puisqu’il suffisait de faire comme tout le monde, c’est-à-dire, écouter je ne sais qui sur Youtube, qu’il soit américain, australien ou français, qui fait du sport et se gorge de bons aliments végétaux et devient la meilleure version de lui-même – je décidai à mon tour de devenir végétalienne en m’assurant toutefois d’être parfaitement rigoureuse dans mes apports nutritionnels et de suivre dans un premier temps les recommandations du Guide du Végétarien Débutant, édité par l’Association Végétarienne de France. Ce guide est apparemment rédigé par des médecins nutritionnistes. Que de bonnes références sérieuses émanant de hautes instances, vraiment… toujours aucune raison de ne pas se lancer !

— Des débuts très heureux —

Au début, tout allait incroyablement bien. J’avais de l’énergie à revendre, je me sentais au meilleur de ma forme. Je vivais une véritable Lune de Miel (ou plutôt, une Lune d’Agave, car je ne mangeais naturellement pas de miel !) qui a duré environ quatre à six mois. Portée par un nouveau cercle d’amis et ayant rompu avec beaucoup d’anciennes personnes qui me semblaient trop fermées d’esprit, j’avais l’impression de tout savoir et d’être une sorte d’avant-gardiste, au coeur d’un mouvement révolutionnaire qui allait changer la face du monde.

J’expliquai à tous ceux que je croisais comment ils devaient manger tellement j’étais fière de partager mes toutes nouvelles connaissances, j’étais intimement convaincue de faire les meilleurs choix sur tous les aspects les plus importants du vivant : pour les animaux, la planète et ma santé. Je me sentais invincible et tellement pertinente !

Après ces quatre mois, j’étais légèrement moins en forme mais pour les apparences, ça allait quand même. Je m’infligeai occasionnellement de nouveaux dogmes alimentaires encore plus stricts (cures, jus, fruits…) pour retrouver mon état radieux du début, ce qui a fonctionné un temps et m’a permis de renforcer mes convictions et tenir plus longtemps.

Mais même si je commençais à être moins bien, je n’attribuais pas mes différents problèmes au véganisme. C’était impossible, car j’étais l’exemple-même de la personne qui fait tellement les choses jusqu’au bout et avec conviction que si, à l’époque, j’avais lu le genre de témoignage que je suis en train de rédiger, j’aurais certainement pensé : « oh, je suis sûre qu’elle n’a pas fait les choses comme il faut celle-là. Elle a fait l’impasse sur la B12, elle a trop mangé de gluten, ou pas assez de tofu, ou elle ne mange pas assez, ou elle ne mange pas bio, ou elle a d’autres problèmes qui ne sont pas liés à la nutrition… Et puis de toute façon, les omnivores – à l’époque je disais plutôt les spécistes – ont aussi des problèmes de santé, donc le problème vient forcément d’ailleurs ! » Oui, le dogme était bien plus fort que ma raison ou mon intuition.

— Les premiers signes de la descente aux enfers —

Alors que je continuai mon chemin de végétalienne, mon état commençait sérieusement à décliner jusqu’à ce que deux ans et demi plus tard, je finisse littéralement épuisée. Un épuisement pernicieux et envahissant, handicapant et lourd. J’étais obligée de décliner toute invitation, je passais mes journées au lit. Quand je dis épuisée, ce sont ces symptômes dans le désordre : importante fonte musculaire, carence en fer, en iode, perte de cheveux, perte de force, tremblements, prise de poids, fatigue excessive, dépression, problèmes thyroïdiens, fonte des gencives, repli sur soi, cernes, pâleur, absence de transit…

Bien que les gens que je croisais rarement me trouvaient fatiguée et vieillie, je ne prêtais pas attention à ce qu’ils pouvaient penser. Et puis j’étais trop sûre de moi, ça n’était pas la nutrition, point barre. Finalement, ma santé m’importait peu, tout ce qui comptait, c’étaient les animaux…

Cependant, j’ai quand même fini par ouvrir les yeux.

— Les cacahuètes du Docteur —

Après plusieurs mois alternant le lit et le canapé, j’avais perdu mes repères. J’étais vulnérable et j’avais à peine la force de me lever.

Toutefois, j’ai eu l’impulsion de sortir du véganisme quand un jour, une personne que je croyais être un ami neutre et objectif, un médecin végétalien (Jérôme Bernard-Pellet), m’a déconseillé de remanger des œufs et m’a recommandé de manger des cacahuètes car, je cite, « les cacahuètes sont de très bonnes sources de protéines »…

Je ne le remercierai jamais assez car c’est une telle aberration qui m’a fait avoir le fameux déclic.

Oui, à ce moment-là, tout s’est éclairci. J’ai compris à quel point j’étais tombée dans un mouvement sectaire et dangereux qui m’avait coupé de mes proches, de ma santé et n’avait pas sauvé plus d’animaux, ni amélioré l’état de la planète… J’avais juste réussi à détruire ma santé, et j’ai fini par reconstituer le puzzle en prenant enfin conscience de mon erreur.

En devenant végane, j’avais cru enlever mes œillères alors qu’en fait, j’en avais enfilé une sacrée paire !

J’ai recommencé très timidement les produits d’origine marine (fruits de mer), puis les œufs. Puis j’ai réintroduit le reste au fil des mois. Non pas sans peine.

J’ai aussi dû fermer mon compte Facebook militant avec, à l’époque, près de 3000 amis, dont les hauts représentants du mouvement…

Mais quand même, après ces longs mois de fragilité et de faiblesse, mon organisme a fini par retrouver le chemin de la santé. Je m’en suis définitivement sortie il y a près de deux ans.

— Des gens en souffrance —

Dans ce milieu, j’ai connu des donneurs de leçons particulièrement hargneux en termes de nutrition, eux-mêmes cachés derrière des photos d’animaux mignons, mais atteints d’obésité morbide et de troubles psychiatriques très importants, ainsi que des « scientifiques » manipulateurs, adeptes du « Cherry Picking », vous savez, l’art et la manière de ne choisir que les données scientifiques qui vous arrangent pour asseoir votre argumentation. Niveau objectivité, on repassera !

J’ai croisé la route de gens désœuvrés, qui ne vivaient que pour les réseaux sociaux, connectés du soir au matin, récitant par cœur les mêmes discours entendus et lus partout, avec des messages formatés et copiés-collés, adressant sans arrêt les mêmes visuels, les mêmes liens vers les mêmes vidéos, les mêmes blogs, toujours la même façon de militer, incapables d’écouter ni de prendre en compte le moindre argument contraire au véganisme !

J’ai aussi découvert des beautés incroyables « healthy et spirituelles » hautement inspirantes, avec photos évoquant la vie de rêve et utilisant des citations profondes sur le sens de la vie… mais véritablement malades dans leur vie privée…

J’ai côtoyé les leaders français du mouvement qui étaient franchement charismatiques en vidéo, et tellement éteints, névrosés et épuisés de l’autre côté de l’écran…

J’ai aussi découvert des gens formidables qui ont quitté ce Titanic qu’est le véganisme avant qu’il ne soit trop tard, et d’autres, que je ne côtoie plus, mais dont je sais qu’ils sont inexorablement enfoncés dans des maladies chroniques, ou de la dépression incurable, toujours véganes à l’heure actuelle, mais totalement hermétiques à tout questionnement au plan alimentaire…

J’ai également connu des « véganes » qui se ruaient sur du fromage et autres produits animaux dès qu’ils étaient seuls, notamment dans leur voiture, tout en continuant à montrer en société que tout va bien, à poster des photos de leurs plats « veggie green » avec une horde de hashtags alléchants, pour la gloire… sans doute.

J’ai pleuré avec des parents attentionnés et amoureux des animaux, qui se rendaient bien compte que leurs enfants en bas âge n’étaient pas en bonne santé avec une alimentation végétalienne, mais qui persévéraient quand même par éthique…

Finalement, j’ai sympathisé avec des personnes présentant souvent le même type de profil : intelligents, instruits, rebelles, besoin de reconnaissance, besoin de sensations fortes, rupture familiale, sociale ou professionnelle, réceptifs aux méthodes de culpabilisation, en recherche de but suprême…

Et enfin, j’ai recueilli les confidences de quelques véganes qui souffraient précisément des mêmes maux que moi.

Cela commençait à faire trop de monde pour que je sois la seule concernée.

— Conclusion —

Pour répondre à la question : Est-ce que je regrette d’avoir quitté le véganisme après trois ans ?

La réponse est évidente, mais pour moi et à ce moment-là, il n’était pas question de faire un simple choix, il était surtout l’heure de sauver ma peau !

Je faisais pourtant partie des personnes qui ne voulaient rien savoir et qui pensaient que tout argument contraire au véganisme émanait du lobby carniste… Oui… j’ai pensé ça.

Non, je ne crois pas que l’humain soit fait pour manger uniquement des végétaux. Non, je ne connais aucun végane centenaire. Non, je ne connais aucun véritable végane de longue date, en tout cas pas au-delà de la fameuse barre des cinq ans.

Si la question du bien-être animal reste une vraie question, supprimer tout produit animal de l’alimentation humaine a visiblement des conséquences très importantes et beaucoup en paient le prix fort en silence, par peur des représailles de la véganosphère.

Pour un mouvement de non-violence, paradoxalement, quelle violence s’inflige t-on au nom de certaines croyances !

— Dernier message aux militants —

Le jour où vous vous apercevez que votre santé décline de façon inexplicable, que vous avez beau dépenser beaucoup d’argent dans des tas de compléments alimentaires et suivre tout un tas de recommandations sans voir la moindre amélioration sur le long terme, je vous en prie, osez remettre en question votre alimentation végétale, car ce ne seront pas les gourous de Youtube et les « amis » sur les réseaux sociaux qui viendront vous tenir la main et vous aider à sortir de là.

Témoignage recueilli par Vegan Intox.

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